L’industrie plastique est parmi les plus importantes activités industrielles chimiques en termes de quantité et de diversité des secteurs d’applications. C’est l’emballage qui le principal contributeur des problèmes liés à la gestion des déchets. A cela s’ajoute une ressource fossile (pétrole) dont le stock est limité.
Une alternative correspond aux biopolymères. Derrière ce terme, il y a pour faire simple deux concepts principaux :
- Les polymères biosourcés naturels ou synthétiques, c’est-à-dire essentiellement issus du monde végétal. Il s’agit d’une source alternative aux gisements fossiles. Ceci implique dans un idéal encore lointain la conversion d’une industrie quasiment exclusivement basée depuis les révolutions industrielles sur la chimie du pétrole (pétrochimie) vers une industrie dont la chimie serait basée sur celle du sucre (sucrochimie). Ces « nouvelles » ressources (pas si nouvelles) sont qualifiées de matières premières renouvelables.
Il existe donc des équivalents biosourcés aux thermoplastiques qui dominent le marché comme le polyéthylène (PE), le polypropylène (PP) et le polytéréphtalate (PET). En effet, le bio-PE ou le bio-PP synthétisés par voie chimique à partir des monomères correspondants obtenus par fermentation ont les mêmes propriétés que leurs modèles pétrosourcés et peuvent même s’intégrer dans leurs systèmes de recyclage.
- Les polymères biodégradables naturels où synthétiques qui permettent de par la présence au niveau de la structure chaîne de fonctions chimiques facilement hydrolysables par des catalyseurs biologiques (enzymes issus d’organismes vivants) de pouvoir « dépolymériser » tout ou partie du polymère. Ici ce processus permet d’envisager deux issues possibles : les monomères ainsi formés servent a) soit de nutriments aux organismes vivants. C’est-à-dire qu’il y a réintégration de cette ressource dans le cycle naturel du carbone, b) soit de « gisements alternatifs » pour l’industrie afin de former de nouveaux matériaux en minimisant la formation de déchets (recyclage).
Grâce à leurs propriétés de biodégradabilité, ces polymères pourraient constituer une solution aux problèmes environnementaux engendrés par les importants tonnages de déchets plastiques.
La biodégradabilité
Les biopolymères (biosourcés) sont synthétisés dans les bactéries, les plantes ou les animaux par voies enzymatiques (anabolisme) et également toujours par voies enzymatiques dégradés (catabolisme) rapidement dans un milieu biologique.
Une enzyme est un « outil biochimique » produit par une cellule qui permet de catalyser une réaction, c’est-à-dire ici de favoriser soit la synthèse soit la dégradation selon le cas du polymère.
La biodégradabilité de la plupart des biopolymères est due à la présence de liaisons facilement clivables comme les liaisons esters ou amides conduisant à la formation de molécules simples et de fragments de plus petite taille. Ces derniers sont assimilables par les microorganismes pour leur biosynthèse en libérant du CO2 et de lʼH2O.
Les polymères pétrochimiques ne possèdent pas ces liaisons clivables facilement comme le polyéthylène ou le polypropylène en raison d’un squelette carboné exclusivement constitué de liaisons covalentes C-C. Ceux-ci étant beaucoup moins sensibles aux activités biologiques, d’autres facteurs permettent une dégradation nécessitant plus de temps. Ces facteurs sont la chaleur, les irradiations solaires ou la présence d’un catalyseur chimique.
Les bactéries et les champignons sont les principaux microorganismes impliqués dans la dégradation des polymères biodégradables. Ainsi si la vache peut se nourrir et digérer la cellulose, c’est parce qu’elle possède une flore bactérienne stomachale adaptée produisant des enzymes particulières comme les cellulases capables de digérer la cellulose.
L’hydrolyse des fonctions esters libère dans ce cas, si elle est complète, du glucose (qui est assimilable). Les cinétiques de réaction d’hydrolyse dépendent de la cristallinité du polymère. Pour faire simple, plus il est cristallin moins les enzymes ont un accès facile et plus la dépolymérisation sera lente et inversement plus il est amorphe plus les enzymes ont un accès facile aux fonctions hydrolysables plus la dépolymérisation est rapide. Cette accessibilité peut être favorisée par une action mécanique comme le broyage (la vache rumine c’est-à-dire broie les fibres un tiers de sa vie pour pouvoir digérer la cellulose !).
D’une façon générale, l’hydrolyse d’un ester donne deux produits c’est-à-dire l’acide et l’alcool correspondants. Les fonctions esters sont les fonctions hydrolysables dans les polymères comme la cellulose, l’amidon, le polylactide.
Autres propriétés spécifiques
La propriété de biodégradabilité des biopolymères est particulièrement intéressante pour des applications bien spécifiques. Il est bien évident que dans certaines applications notamment dans le domaine de la construction, on cherchera plutôt des matériaux stables non biodégradables. Il existe certain(e)s critères/précautions d’utilisation des biopolymères biodégradables :
- Une utilisation à courte durée de vie.
- Des applications à court terme lorsqu’ils sont en contact avec le sol.
- Un risque de contamination des matériaux rendant difficile le triage et le recyclage des déchets.
- Des applications qui nécessitent des précautions d’hygiène et de stérilisation dans le domaine médical.
- Les sacs de traitement des déchets pour compostage.
- D’une manière générale pour les applications où il est difficile de contrôler les déchets.
La biodégradabilité des matériaux seule n’est pas suffisante. En effet, pour tirer profit de cette propriété, les matériaux doivent être en plus compostables. La compostabilité introduit la notion de délai et des conditions de température et d’humidité bien spécifiques à la biodégradation. Le produit obtenu ne doit pas émettre des produits visibles et toxiques pour l’environnement. Un « compost » valorisable en agriculture et en horticulture pourrait être alors obtenu.
Il existe des normes qui spécifient les exigences de biodégradabilité des emballages et les tests à mettre en œuvre pour évaluer leur transformation sous forme de compost. Quatre critères de compostabilité sont pris en compte.
- La composition en matière organique (au minimum 50 %) et la concentration maximum pour 11 métaux lourds.
- La biodégradation des matériaux dans un délai déterminé. Les tests de mesure de la biodégradation utilisés sont les tests d’évaluation de CO2 dégagé et la mesure dʼO2 absorbé. Le seuil acceptable de biodégradabilité est de 90 % sur une période maximum de 6 mois.
- La désintégration des produits finaux, c’est-à-dire l’aptitude du matériau à se fragmenter, est évaluée par compostage en essai pilote. La masse de fragment retenue sur un tamis de 2 mm ne doit pas dépasser les 10 % de la masse initiale du matériau après 12 semaines.
- La qualité de compost. Il est évalué par la mesure des paramètres physico-chimiques (masse volumique, teneur en solide, etc.) et des tests d’écotoxicité.
L’enjeu est d’avoir un matériau qui ne se dégrade pas le temps de son usage mais qui après son usage doit pouvoir se résorber ou disparaître facilement afin de diminuer son impact en tant que déchet.
Article écrit par Frédéric de Montigny